Étiquettes

, , , , , , , , , ,

Les premières phrases

« La rivière Liss court du nord au sud et ses eaux abondent en grammaire. Les enfants qui marmonnent sur leurs livres de classe aujourd’hui ont une piètre idée de la grammaire. La grammaire est ennuyeuse, difficile, lente ; la grammaire est un fer posé sur la langue, corrigeant les malgré que en bien que, les après qu’il soit en après qu’il fut. La grammaire et les grammairiens sont des sergents de ville qui vous observent d’un œil sévère quand vous enfreignez la concordance des temps, étrécissant les yeux devant un pléonasme tout en claquant leur matraque en point-virgule contre leur paume.

Mais la vérité de la grammaire ne se trouve pas là. Il fut un temps où la grammaire était sauvage – où elle changeait d’apparence et dégageait de nouvelles formes des anciennes. Grammaire, comme on dit grimoire. Qu’est-ce que la magie, sinon une modification dans le monde. »

Impressions

Après avoir eu un gros coup de cœur pour Les oiseaux du temps, écrit à quatre mains avec Max Gladstone, c’est avec une certaine impatience que j’attendais cette nouvelle parution d’Amal El-Mohtar. The river has roots est une novella d’un plus plus de 100 pages nous embarquant dans un monde entre réalité et féérie. C’est surtout une belle histoire de sororité, à la fois douce et cruelle, à l’image des contes de fées.

Imaginez deux saules entrelacés au-dessus d’une rivière traversant le monde des humains et le monde des fées. C’est là, chaque soir, que viennent chanter les sœurs Hawthorn, Esther et Ysabel. Petites, elles s’étaient perdues en Arcadie, ce monde merveilleux dont on ne revient généralement pas. Depuis, Esther éprouve de la mélancolie envers ce monde féérique qu’elles n’ont fait que toucher du doigt, jusqu’au jour où un être venant d’Arcadie surgit dans sa vie.

Ce texte empli d’émotions et de poésie se lit d’une traite, comme une pause bienvenue semblant arrêter le temps. Mettez votre quotidien entre parenthèse et immergez-vous dans cette novella, faisant la part belle aux liens que l’on peut tisser entre sœurs, et à la place de la musique et du langage dans nos vies.

The river has roots – Amal El-Mohtar – Nouveaux millénaires (J’ai lu) – Octobre 2025 – Traduit de l’anglais (Canada) par Patrick Marcel – Illustrations intérieures réalisées par Kathleen Neeley