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« Quelle histoire vous intéresse, au juste ?
Honnêtement, je ne vois pas trop. Même après tout ce qui s’est passé, Zelu sera toujours Zelu pour moi, point barre. Ce que vous croyez savoir sur elle n’est que pure invention. La vie est courte. La fortune, éphémère. La notoriété, un simple tourbillon de poussière. Ce sont les gens qui rêvent et s’imaginent des choses lorsqu’ils prononcent votre nom, comme si c’était un objet tangible – ce qu’il n’est pas. Un nom n’est rien de plus qu’un nom. Un son.
Ce qui compte, c’est la famille. Sans famille, vous n’êtes rien. Rien qu’un débris qui chute à travers l’espace. Ni vu, ni connecté, ni collecté – inconnu, quel que soit le niveau de votre célébrité.
Zelu fera toujours partie de notre famille. Elle sera toujours ma sœur. Quoi qu’il advienne. »
Impressions
Avec La mort de l’auteur, Nnedi Okorafor propose un roman de SF qui devrait plaire aussi bien aux amateurs du genre qu’aux néophytes en la matière. Elle aborde en effet principalement la question de la création puis de l’appropriation d’une œuvre littéraire par ses lecteurs (le fameux concept de la mort de l’auteur de Roland Barthes). En ce sens, ce roman n’est pas sans rappeler des thématiques abordées par R.F. Kuang dans son thriller Yellowface.
Ici, Nnedi Okorafor construit son récit autour de trois niveaux de narration : le premier nous fait suivre le quotidien de Zelu, jeune femme paraplégique d’origine nigériano-américaine qui va subitement connaître le succès avec son roman de SF Robots rouillés ; le second nous propose des interviews de membres de sa famille ; le troisième nous transporte entre les pages de son roman Robots rouillés, aux côtés du robot Ankara et d’IA fantômes. Si les interviews des membres de sa famille m’ont au final peu intéressée (je dois dire que j’ai détesté quasiment toute sa famille !), les deux autres modes narratifs sont prenants, même si j’attendais un peu plus de la partie axée sur les robots et les IA.
Les thématiques abordées sont en tout cas passionnantes : handicap, IA, processus créatif, appropriation d’une œuvre par le public une fois publiée, rapport au corps, tolérance, empathie, humanité… L’héroïne est particulièrement émouvante dans ses questionnements et sa volonté de s’approprier son propre corps, d’oser faire des choix (même risqués), d’aller au bout de ses rêves en dépit du jugement des autres. J’avais d’ailleurs beaucoup d’appréhension et d’énervement face à ce qui lui arrivait, en particulier les réactions de sa famille face à ses choix. Le regard des autres (aussi bien des inconnus que de ses proches) sur son handicap est particulièrement bien décrit et révoltant. Ce fut au final une lecture assez éprouvante pour mes nerfs mais que je ne regrette pas.
Une citation marquante :
« Elle adore la science-fiction et lit goulûment. C’est d’ailleurs elle qui m’a expliqué en quoi ce genre littéraire est si important. En quoi il aborde la différence, permet de voir davantage, d’examiner la nature humaine et d’inventer demain. Sa seule existence m’a aidé à évoluer en tant qu’homme et en tant que personne. »
La mort de l’auteur – Nnedi Okorafor – Mars 2025 – Robert Laffont – traduit de l’anglais (USA) par Fabien Le Roy – Couverture réalisée par Victor Lejeune


